L’entreprise concurrencée mais protectrice
Dans le monde animal (auquel nous appartenons), la peur est indispensable à la survie : elle alerte face au danger en mobilisant les ressources nécessaires pour s’y soustraire, telle, chez les mammifères, la sécrétion intense d’adrénaline par la proie pour qu’elle puisse fuir le prédateur ou s’en défendre.
Dans une société humaine développée grâce à l’économie de marché, l’entreprise est semblablement menacée : la concurrence est rude.
Mais, attentive à son environnement externe et à son évolution interne, elle sait évaluer les risques à prendre et anticiper ceux à éviter pour, sinon se développer, du moins se maintenir. Elle est en elle-même un complexe dispositif de parades aux dangers. De ce fait (en reprenant la notion de Servigne et Chapelle dans leur décapant ouvrage L’Entraide, l’autre loi de la jungle), l’entreprise fonctionne comme une « membrane » qui « contient, protège, garantit une identité et filtre les échanges avec l’extérieur », pour qu’en son sein, les employés puissent se sentir aussi sécurisés (et donc être aussi performants) que possible. Et pourtant…
La peur n’évite pas le danger
La vie en entreprise n’étant pas un long fleuve tranquille, il est fréquent qu’un collaborateur ait peur durant son exercice professionnel, sans être pour autant un ergophobe qui va au boulot la trouille au ventre ni la victime de ses propres fragilités (manque d’assurance intrinsèque ou surmenage conjoncturel).
Mais la peur n’a pas droit de cité dans l’entreprise : l’avouer serait douter publiquement de soi et donc s’auto-disqualifier.
N’empêche, sa gamme est étendue : peur de l’incertitude du changement, peur de réclamer les moyens manquants pour venir à bout de sa charge de travail, peur de ne pas maîtriser l’afflux d’informations, peur de ne pas être à la hauteur d’une augmentation des objectifs, peur de ne pas faire face à un rapport de force, peur de perdre le contrôle en déléguant, peur de l’appréciation de son entourage (hiérarchie, collègues et/ou collaborateurs), peur d’une visibilité accrue qui exposerait trop, peur de perdre en compétences si on ne les actualise pas en permanence, peur d’être privé de son minimum de convivialité vital, peur de trahir ses propres valeurs, peur de sortir de sa zone de confort…
Peur stimulante ou peur inhibante ? C’est la dose qui fait le poison.
Lire l'article "La peur : une émotion que l’on cache en entreprise" sur EgoPrism Talent Management